
„Les chats ne parlent que lorsque c’est indispensable.“
Christian de Dotremont
Les Éditions Gallimard à Paris viennenrt de publier une anthologie de poèmes de Christian Dotremont (1922-1979) sous le titre Les grandes choses. Anthologie poétique 1940-1979. Michel Sicard a édité ce recueil et la postface est signée Yves Bonnefoy (1923-1016).
Dans son introduction à ce volume, Michel Sicard interprète une œuvre poétique comme l’expérience de toute une vie, ce qui explique pourquoi Dotremont n’a pas lui-même publié des recueils de ses œuvres. Ses poèmes, loin d’être des poèmes de circonstance, ont été publiés à différents endroits. Loin d’être de simples intermèdes, ils reflètent un « itinéraire intérieur » que l’éditeur souhaite ici rendre compréhensible par une sélection bien réfléchie des poèmes de Dotremont.
Un recueil similaire a déjà été publié en 1998 (Mercure de France) ainsi que dans une deuxième édition en 2004 avec des poèmes inédits de l’auteur. En 1978, un an avant sa mort, il a confié à Michel Sicard une liste de ses œuvres, plaquettes, mais aussi de ses logogrammes (inventés en 1962), qui n’ont pas été incluse dans le présent volume en raison de leur taille et de leur volume plastique. En 1989, Sicard avait déjà publié une sélection des poèmes de Dotremont sous le titre Abstrates aux éditions Fata Morgana. Une autre édition, les Œuvres poétiques complètes, est parue en 1998, puis avec quelques corrections en 2004, de livrets, de grands logogrammes accompagné d’un texte d’Yves Bonnefoy.
Le volume qui vient d’être publié vise à rendre hommage au Dotremont littéraire : “… montrant comment le travail sur le langage et sur l’espace atteint une forme complexe et subtile qui signe pour Dotremont le sillage de son aura et son aventure poétique.“ (p. 10) C’est pour cette raison que notre rédaction a donné à cette critique le titre « … il joue avec le ton de la langue ». Cela commence dès le premier poème « Ancienne éternité », écrit pour Doris en 1940 à l’âge de 17 ans, puis deux ans plus tard « La reine des murs », qui se présente sous une forme similaire, non pas sous forme de poème mais de texte avec des longs tirets, tirets de dialogue ou “ tirets d’approfondisssement” ( p. 15). Le poème « Les grandes choses », qui a donné son titre à cette sélection, est une bonne preuve de l’idée que Dotremont joue avec le ton de la langue :
„Depuis longtemps, depuis qu’il y a des arbres, et même avant,
Depuis, il y a le silence,
J’avais envie de dire quelque chose, de le rompre comme du pain, le silence,…“ (p. 112)
„Ltation exa tumulte“ élargit le jeu de composition des mots :
„Heureusement qu’il y a
que je dispose de
douleur pour me distraire
et malheur pour m’asseoir
pour m’effilocher peine
me répandre manique
la tête de moi
vertige pour étendre
le plancher de ma chambre…“ (p. 306) ;
puis décompose ces mots jusqu’aux syllabes, les écartant, les permutant, en utilisant la figure de style de la tmèse :
“Ltation exa tumulte
de titude de globes
dans la chambre vague de murs
tournant sur nos yeux et mains de roue
dans la bijouterie gl
terrestre de haut vol
de fin fond issemnt
de formes en tournois” (p. 310) .
Pour Sicard, “Dotremont dévouvre peu à peu le mythe d’une langue/écriture naturelle où l’humain s’inclut dans la nature…“ (p. 11) La ressemblance entre Rimbaud et Dotremont, selon l’éditeur, est évidente, notamment à cause de “la sortie errante du langage vers un espace ouvert….“ (p. 12) Sicard qualifie la poésie de Dotremont d’existentielle aussi à cause de la proximité avec la mort comme dans « Ancienne éternité ». Mais il y a aussi les traces autobiographiques, quand le poète se cache en tant que personne fictive, dont on peut suivre les traces jusqu’à « Lobookletter », son dernier poème.
Les relations de Dotremont avec les surréalistes sont passionnantes. Il est très familier avec Breton (ses amoureuses font penser à Nadja), mais aussi avec Éluard et Cocteau. Bente, la Danoise qu’il a rencontrée en 1951, l’inspire également et se trouve au début de sa passion pour le Grand Nord. La diversité dans son œuvre nous étonne : « Dotremont est un poète du visuel ». (p. 16) Il explore l’espace avec sa poésie : « Il est un guetteur d’écriture…. » (ibid.) Bien sûr, il est aussi un artiste des mots : déformations, réinterprétations, il laisse les mots se redéfinir dans un espace élargi. C’est bien plus qu’un jeu avec les mots, c’est comme s’il observait leurs sens, comment ils se comportent et changent. « Belle Isa ». Impromptu » (1948, p. 89) en est un très bon exemple et aussi le poème qui correspond à l’idée qu’il joue avec le ton de la langue :
„Belle Isa, tes cils
Gracile, tes bas
Gris sale des villes
Mon dieu qu’il fait bas“
Yves Bonnefoy évoque dans sa postface l’un de ses meilleurs amis du temps où ils avaient la même difficile condition.
Dans “Abstrates“ (p. 242-245), Dotremont désarticule et malmène la langue :
“L’a pas cours ma teinte
point inscrite
arrivée trop tard ma trace de cloison
arrivée trop bas
gringola dans les foncements
fit bulle
ni mot, ni chant ni cri
arrivée de biais
après la closerie du tri“
…
Dans la note de bas de page qui l’accompagne, on peut lire “Abstrates, placard lithographique, 62 x 85 cm, avec fac-similé du tapuscrit de C.D., illustré par Alechinsky, Valby Danemark…“ C’est une œuvre d’art total où feuilles de texte et images s’entrelacent ; Dotremont y mobilise la langue et, d’une manière très particulière, la forme du poème devient indissociable de son contenu. Les mots font l’expérience d’un nouvel environnement — c’est un test — et quelque chose de nouveau se produit lorsque le lecteur s’engage dans le poème et essaie lui-même de reproduire le jeu des mots. C’est particulièrement évident lors de la lecture à voix haute. En effet, le son révèle un ton très particulier, un style personnel avec des rythmes comme dans « Dans ma chambre » (1977, p. 325) : “dans ma chambre, ou pour mieux dire : dans ma carrée, le carrée étant le châssis d’un lit valant deux rondes de musique, dans ma carrée pour la charade, une chienne criait à la nuit, à chanter charade, une baie pour mon navire…“
Des exemples comme les deux derniers montrent à quel point cette présentation des poèmes de Dotremont dans leur variété et leur inventivité est réussie. D’une part, leur ordre chronologique révèle comment Dotremont développe sa poétique, mais en même temps, un style particulier est reconnaissable et montre la personnalité du poète, que l’éditeur Michel Sicard présente avec précision, en soulignant certaines « lignes directrices » (p. 11).
Bei Gallimard in Paris ist gerade eine Anthologie mit Gedichten von Christian Dotremont (1922-1979) unter dem Titel > Les grandes choses. Anthologie poétique 1940-1979. Michel Sicard hat diese Sammlung herausgegeben und das Nachwort stammt von Yves Bonnefoy (1923-1016).
In seiner Einleitung zu diesem Band deutet Michel Sicard ein poetisches Werk als die Erfahrung eines ganzen Lebens, womit er erklären möchte, wieso Dotremont nicht selber Sammlungen seiner Werke veröffentlicht hat. Seine Gedichte, keineswegs nur Gelegenheitsgedichte, veröffentlichte er an verschiedenen Stellen. Das waren bei weitem keine bloßen Zwischenrufe, sondern sie geben einen „itinéraire intérieur“ wider, den der Herausgeber hier durch eine wohlüberlegte Auswahl der Gedichte Dotremonts verständlich machen möchte.
Ein ähnlich Sammlung erschien schon 1998 (Mercure de France) sowie auch in einer zweiten Auflage 2004 mit unbekannten Gedichten des Autors. 1978, ein Jahr vor seinem Tod, vertraute er Michel Sicard eine Liste seiner Werke an, zu der auch „Logogramme“ (1962) gehörten, die aber in den hier vorliegenden Band, wegen ihrer Größe und Umfang nicht aufgenommen wurden. 1989 publizierte Sicard eine Auswahl der Gedichte Dotremonts unter dem Titel Abstrates im Verlag Fata Morgana. Eine weitere Ausgabe, die Œuvres poétiques complètes erschien 2004 mit Logogrammen und dem Text von Yves Bonnefoy.
In dem jetzt veröffentlichte Band soll der literarische Dotremont gewürdigt werden: „… montrant comment le travail sur le langage et sur l’espace atteint une forme complexe et subtile qui signe pour Dotremont le sillage de son aura et son aventure poétique.“ (S. 10) Aus diesem Grund hat unsere Redaktion dieser Rezension die Überschrift „… er spielt mit dem Ton der Sprache gegeben.“ Das beginnt schon mit dem ersten Gedicht „Ancienne éternité“, das er 1940 mit 17 Jahren für Doris verfasste oder zwei Jahre später
„La reine des murs“, das sich in einer ähnlichen Form präsentiert, nicht in Gedichtform, sondern als Text mit Trennstrichen (vgl. auch S. 15: „des tirets approfondissements“). Das Gedicht „Les grands choses“, das dieser Auswahl den Titel gab, ist ein guter Beleg für die Idee, dass Dotremont mit dem dem Ton der Sprache spielt:
„Depuis longtemps, depuis qu’il y a des arbres, et même avant,
Depuis, il y a le silence,
J’avais envie de dire quelque chose, de le rompre comme du pain, le silence,…“ (p. 112)
Ltation exa tumulte“ erweitert das Spiel mit der Recomposition der Silben, aber nur im Titel:
„Heureusement qu’il y a
que je dispose de
douleur pour me distraire
et malheur pour m’asseoir
pour m’effilocher peine
me répandre manique
la tête de moi
vertige pour étendre
le plancher de ma chambre…“ (p. 306)
Sicard: „Dotremont dévouvre peu à peu le mythe d’une langue/écriture naturelle où l’humain s’inclut dans la nature…“ (S. 11) Die Ähnlichkeit zwischen Rimbaud und Dotremont, so der Herausgeber, sie doch evident, auch wegen der „sortie errante du langage vers un espace ouvert….“ (S. 12) Als existentiel bezeichnet Sicard die Poesie Dotremonts auch wegen der Nähe zum Tod wie in „Ancienne éternité“. Aber es gibt auch die auch die autobiographischen Spuren, wenn der Dichter sich als fiktive Person versteckt, deren spuren man bis „Lobookletter“, sein letztes Gedicht, verfolgen kann.
Spannend sind die Beziehungen Dotremonts zu den Surrealisten. Mit Apollinaire, Breton (Nadja) aber auch Éluard ist er bestens vertraut. Auch Bente, die Dänin, die er 1951 inspiriert ihn und steht am Beginn seiner Passion für den Norden. Die Vielfalt in seinem Werk lässt uns erstaunen: „Dotremont est un poète du visuel.“ (S. 16) Er forscht mit seiner Dichtung: „Il es tun guetteur d’écriture….“ (ib.) Natürlich ist er auch ein Wortkünstler: Deformationen, Umdeutungen, er lässt die Wörter sich in einem Raum sich neu definieren. Das ost viel mehr als ein Spiel mit Wörtern, ganz so, als ob er ihre Sinne beobachtet, wie sie sich verhalten und verändern. „Belle Isa. Impromptu“ (1948, S. 89) ist dafür ein sehr gutes Beispiel und auch das Gedicht was zur Idee, er spiele mit dem Ton der Sprache, passt:
„Belle Isa, tes cils
Gracile, tes bas
Gris sale des villes
Mon dieu qu’il fait bas“
Yves Bonnefoy erinnert in seinem Nachwort an einen seiner besten Freunde.
„Abstrates“ (p. 242-245):
„L’a pas cours ma teinte
point inscrite
arrivée trop tard ma trace de cloison
arrivée trop bas
gringola dans les foncements
fit bulle
ni mot, ni chant ni cri
arrivée de biais
après la closerie du tri“
…
In der Fußnote dazu steht „Abstrates, placard lithographique, 62 * 85 m, avec fac-similé du tapuscrit de C.D., illustré par Alechinsky, Valby Danemark…“ ein Gesamtkunstwerk, Dotremont mobilisert die Sprache und in ganz besonderer Weise die Form des Gedichts, die mit seinem Inhalt untrennbar verbunden ist.Wörter erleben eine neue Umgebung, das ist ein Austesten und es steht auch etwas Neues, wenn der Leser sich auf das Gedicht einlässt und selber versucht, das Spiel der Wörter nachzuvollziehen. Das wird beim Vorlesen ganz besonders deutlich. In der Tat, der Klang verrät einen sehr eigentümlichen Ton, einen persönlichen Stil mit Rhythmen wie in „Dans ma chambre“ (1977, S. 325): „dans ma chambre, ou pour mieux dire: dans ma carrée, le carrée étant le châssis d’un lit valant deux rondes de musique, dans ma carrée pour la charade, une chienne criait à la nuit, à chanter charade, une baie pour mon navire…“
Beispiele wie die beiden Letztgenannten zeigen, wie gelungen diese Präsentation der Gedichten Dotremonts ist. Zum einen ihre chronologische Anordnung verrät, wie Dotremont seine Poetik entwickelt zugleich wird aber ein Stil erkennbar, die Persönlichkeit des Dichters, die der Herausgeber Michel Sicard mit der Betonung bestimmter „lignes directrices“ (S. 11) präzise vorstellt.
Christian Dotremont
> Les grandes choses. Anthologie poétique 1940-1979
Édition de Michel Sicard. Postface d’Yves Bonnefoy
Collection Poésie/Gallimard (no589)
Paris: Gallimard 2025.